Ce blog constitue un recueil de témoignages issus du forum de la Fédération Francophone des Sourds de Belgique

L’enfant sourd non-implanté peut s’en sortir tout autant qu’un implanté



Témoignage de Marie-Florence, jeune fille de 20 ans appareillée à 3 mois :

J'en ai marre que le monde sourd lui-même soit fermé à ses propres limites, ne comprenne pas que sans implant et parfois sans interprète, une personne peut réussir. (je ne considère pourtant pas encore avoir réussi, qui me dit que je n'aurai pas de difficultés à passer la barrière de la surdité lors de mon emploi, et encore dans ce que je veux faire). Ne vendons pas la peau de l'ours avant de l'avoir tué.

Vous qui pouvez me lire, n'ayez pas peur d'être justes, de dire autour de vous que les sourds peuvent réussir, même avec une surdité profonde. Le LPC, Les interprètes, tout cela existe pour permettre l'intégration en milieu scolaire normal et beaucoup peuvent y parvenir.

Je connais quelqu'un qui, j'estime, en est au même niveau que moi de lecture labiale et d'audition, parle aussi bien, mais n'a jamais voulu essayer de se débrouiller sans interprète.
Je comprends le confort, c'est normal de ne pas vouloir y renoncer, mais c'est pour dire que c'est dur pour nous, sourds d'aller au dela de préjugés véhiculés par les entendants, mais si en plus ils le sont par les sourds, alors là, c'est encore plus dur !!

Je vous avoue qu'à l'université je ne comprends pas tout.
Une bonne partie, c'est sur, avec mon FM, oui ça existe et beaucoup l'oublient qu'il y a des aides techniques et que celles ci ne sont pas seulement pour les malentendants !
Mais je développe une autre manière de travailler, en lisant des notes, en demandant des tuyaux autour de moi, ...
Beaucoup de sourds profonds ont fait l'université de cette manière avant moi, mais ils ne se montrent pas. Ca ne m'étonnerait pas que ce soit par dégout de cette communauté sourde, de, j'ai envie de dire, bas étage, (façon de dire qu'elle ne se limite pas à ça) pleine de limites imposées et inconscientes.

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Témoignage de Catherine :

Je fais partie de ces sourds qui ont "réussi", enfin qu'est-ce que c'est réussir pour vous ?
Il y a plusieurs formes de réussite.
Exemple, pour moi, un sourd ouvrier, doué des mains, travaillant en ETA et heureux dans sa vie, c'est une réussite, SA réussite.

Oui, je suis bilingue (LS + oralisme), j'ai un diplôme et un emploi dont je rêvais adolescente...
Je n'ai commencé à faire appel aux interprètes qu'une fois mes études terminées pour m'intégrer à 100% dans ma vie professionnelle (réunions, ...)
J'en profite pour remercier l'inventeur de la Langue des Signes.
Elle me permet de m'épanouir davantage, cela fait partie du confort auquel j'ai droit, auquel vous avez droit.
Pour mes études, comme le disait justement Marie-Florence, je m'étais débrouillée avec des notes de mes camarades, ...

Mais ... mais ... les sourds m'ont souvent regardée de travers, combien de fois ai-je "entendu" dire que je n'étais pas une vraie sourde, que je ne faisais pas partie de leur communauté, que je n'y connaissais rien à leur culture... c'est dur !
Ca va mieux, surtout depuis qu'ils voient que je pratique très couramment la LS...
Et je suis en province de Luxembourg, à l'abri de ces préjugés et je fais mon bonhomme de chemin tranquille...
J'ai l'impression qu'on est plus tolérant dans le sud... je m'trompe ?

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témoignage de Ben, sourd profond :

Je suis plutôt peu d'accord avec le fait que les sourds ne peuvent pas être au niveau des entendants. J'ai terminé mes études parmi les premiers de ma promotion. Seulement il faut avoir plus de courage pour fournir plus de travail pour arriver à ses objectifs. Il faut rattraper le décalage en soirée ou les week-ends, il faut dépenser plus d'énergie pour suivre les cours. C'est le système qui nous empêche de suivre les cours avec la même aisance que les entendants.

Il faut prendre exemple sur les USA, le Canada, où les sourds sont beaucoup mieux intégrés: ils ont pu suivre leurs études universitaires complètement en LS et exercent quasi les mêmes professions que les entendants. La clé de tout ça est la LS mais malheureusement notre gouvernement nous met des freins considérables pour rattrapper le retard dû au Congrès de Milan... En plus il existe encore de nombreux clichés sur les sourds, par exemple qu'un sourd ne peut pas parler correctemment le français, ce qui est faux bien sûr, si cela se rencontre en fait dans la réalité c'est que les méthodes d'enseignement sont inappropriées: contrairement aux apparences, on peut apprendre le français avec la LS...

Quant au commentaire sur le fait que les sourds oralistes considèrent les sourds signeurs comme un monde à part, c'est plus ou moins vrai car ils ne se désintéressent pas complètement d'eux. Les sourds oralistes sont ceux qui ont choisi de faire comme les entendants, considérons-les donc comme des entendants: comme eux ils manquent simplement de moyens "démocratiques" de les rencontrer: comme les sourds signeurs sont mal intégrés dans la société, ils vivent un peu comme en ghettos. Heureusement actuellement les Chuuut parties semblent petit à petit briser les murs.

Si Michel a des problèmes pour se faire des amis et rencontrer des jeunes intéressants, les foyers sont là pour ça.
Si on parle du travail, alors là je comprends, la seule chose que je conseille c'est de s'armer de patience ou, pourquoi pas, suggérer au patron d'engager 1 ou 2 sourds en plus...
En effet, le meilleur modèle d'intégration professionnelle serait d'avoir à la fois des entendants et des sourds (et pas un seul !) qui communiquent entre eux en LS (sans obligation pour tous): cela constituerait un merveilleux modèle d'entraide. Voir par exemple Les Ateliers du Monceau et Exki.

Bien sûr qu'il faudrait plancher sur un projet de nouvelle entreprise intégrée, pour cela je pense qu'il faudrait pousser la barre plus haut en ne se limitant pas à un travail ouvrier comme les deux entreprises précitées: les sourds ont un énorme potentiel et il faut le prouver.
Pourquoi pas par exemple une sorte de "Touring Secours" de l'informatique: dépannage à domicile ou en atelier de PC, maintenance, services/aide(helpdesk) informatique, sous-traitance informatique, montage de PCs,...
Ceci requiert des diplômes divers allant du simple ouvrier à l'ingénieur...
Faudrait aussi se renseigner quelles sont les entreprises intégrées existants aux USA, au Canada, en Suède, ...

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Témoignage de Charlotte, jeune fille de 17 ans implantée à l’âge de 10 ans :

Comme je l’ai déjà dit, j’ai beaucoup de connaissances sourdes qui sont comme moi, qui ne sont pas implantés et qui pourtant, s’en sortent très bien !
Bien sûr, cela dépend des personnes car malgré notre point commun, celui de la surdité, on est différent et chacun n’évolue pas de la même façon.
Et personne n’entend de la même façon.
Encore aussi, il est important que les parents acceptent la surdité de leur enfant. Je comprends que ce n’est pas facile pour eux, surtout si un enfant sourd débarque dans une famille entendante depuis des générations !
Donc c’est important qu’ils soient informés, aussi. Et que l’enfant apprenne à s’accepter comme il est, surtout lorsqu’il sera adolescent.
Mais il faut d’abord que les parents acceptent, ensuite l’enfant. Sans les parents, je crois qu’il aura encore plus de difficultés.

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Mais je connais des sourds « pires que moi » (je n’aime pas dire cela car c’est péjoratif à leur égard même si ce n’est pas mon intention mais je ne vois pas comment exprimer cela autrement donc excusez-moi !).
C’est-à-dire qu’il y en a qui parlent très mal, qui n’entendent rien du tout et qui ne mettent même pas d’appareils, etc.
Malgré tout, ils se débrouillent bien dans la vie, ils arrivent à communiquer même s’il y a des difficultés, etc.
Et ils prennent des interprètes au cas où… Je sais que tout dépend chacun de leur évolution, éducation, etc.

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Témoignage de Fred, sourd profond, appareillé :

Je suis sourd de naissance, mes parents le sont aussi.
Quand j'avais l'âge d'environ 10ans, je ne souviens plus, l'orl de la clinique Universitaire Saint-Luc m'avait proposé la nouvelle technologie pour mieux entendre "l'implant".
J'avais répondu d'office un mot "NON" pour quelle raison, je n'aime pas l'opération et les risques en cas de panne, on perdra du temps en retournant à l'hôpital pour réopérer voire des séances intensives chez la logopède.
Mais mes parents ne me forcent pas car ils me respectent car c'est ma conscience qui décide ainsi c'est mon corps que je prends soin…

La chose unique c'est que je ne comprends pas du tout pourquoi n'existent pas une loi qui interdise l'implantation chez l'enfant jusqu'à sa majorité afin que l'enfant prenne la conscience d'en décider et non les parents mal informées….

Il ne faut pas croire que l'implantation a un risque de marge 0, pour moi ça n'existe pas, et c'est quasiment impossible car c'est usage INTERNE, c'est un cas très complexe c'est-à-dire que l'implant peut modifier le comportement de la personne (enfant ou adulte), des troubles psychologiques, perte des motivations, etc…

(…)
Depuis ma naissance je porte mes prothèses auditifs même mes parents m'obligent à le mettre mes prothèses pour mieux m'habituer et finalement je leur remercie.
Depuis 3ans, j'ai du changer mes prothèses analogiques par numérique, je remarque un énorme changement, on entend un peu plus précisément les sons ou les bruits de l'ambiance mais aussi de la personne, malgré tout je lis toujours à la lecture labiale.

Actuellement je travaille comme Administrateur Système en Informatique dans un hôpital, je m'y sens très bien à l'aise. Je remercie Dieu pour avoir dit non pour l'implantation ainsi à mes parents pour tout ce qu'ils m'ont respectés ainsi soutenus pour mes études, ainsi mes études supérieures…

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Témoignage de Marie-Florence, jeune fille de 20 ans appareillée à 3 mois :

Je clarifie tout de suite, je n'ai pas d'implant, je suis sourde profonde et appareillée depuis mes trois mois.
Et je suis ce qu'on considère en général "un cas exceptionnel de réussite". Je n'ai pas à me plaindre de grosses souffrances comme la plupart des sourds.
J’ai eu des amies entendantes, j’ai été très entourée dans ma scolarité, ma mère a appris le LPC, comme mon père et ma sœur, et ma famille m’a toujours acceptée, bref la vie un peu en rose…

Seulement, j'ai grandi dans un environnement exclusivement oraliste et mes seuls contacts avec la langue des signes ont commencé à 9 ans, lors des activités du CREE.
Au début j'ai bien paniqué, on ne pouvait pas pratiquer de LPC mais seulement de la langue des signes. Heureusement j'ai trouvé une fille qui était dans le même cas que moi.

Mes parents, lorsque j'étais petite, ne savaient pas très bien ce qu'était la culture sourde, mon père m'a dit que ce qu'on leur renvoyait comme image était très flou, très mal défini mais que malgré tout, ils avaient ressenti une certaine appréhension de la part des adultes sourds au fait d'élever un enfant exclusivement dans l'oralisme, même s'ils ne savaient pas quelles étaient vraiment les raisons. (Heureusement qu’ils ont été perspicaces malgré ce manque flagrant de précision dans l’information.)
Ils ont donc décidé de me laisser faire mon parcours en tant que personne sourde dans la mesure du possible.
(…)Car tout ce qu'ils ne pouvaient pas m'offrir en tant que parents entendants et oralistes, ils savaient que je devais aller le chercher ailleurs, donc ils me poussaient à accomplir cette seconde quête de mon identité par moi-même.

Rien que cela, c'est quelque chose qui devrait être présent dans l'esprit de tous les parents d'enfants qui ont un implant.
Moi je suis appareillée mais disons que je m'en sors 'tellement bien' que c'est un peu comme si j'avais un implant, si on oublie tous les problèmes techniques qui peuvent aussi être l'objet de discussions.
Je précise que j’ai toujours refusé catégoriquement l’implant, pour les mêmes raisons que Fred ci-dessus et parce que ce que j’avais suffisait à mon bonheur (si je ne pouvais toujours pas téléphoner avec l’implant ce n’était pas la peine et j’ai bien fait apparemment).
A défaut d'informer chaque parent, il faut informer chaque médecin, et à défaut de le faire, secouer les ministres qui eux sont nettement moins nombreux et plus influents.
(…)
Malgré que je m'en sorte bien, un enfant qui aura un implant, je doute qu'il ne rencontre pas les mêmes problèmes que moi (difficultés dans les conversations de groupe, impossibilité de comprendre les compréhensions audio, difficulté parce qu'on reste un peu marginal dans le fond) et même s'il ne pipe pas mot en langue des signes dans son école, il viendra toujours un moment donné où, comme moi, il sentira qu'il a besoin de l'autre monde.
Quant à savoir s’il le fera ou pas, ça soulève deux problèmes.

Le premier problème est que ce besoin doit être encouragé dès que l'enfant est petit, sinon il s'habitue et puis au moment ou il rencontre les sourds, il est un peu paniqué parce qu'il est complètement différent d'eux, d'esprit, de culture, et bien souvent d'érudition.
C’est tout juste si j’ai réussi à m’intégrer, sur 10 ans environ !
C’est beaucoup 10 ans, je trouve !
Le deuxième problème est que quand on entre dans le monde sourd, en ayant un parcours d'oraliste, on se fait jeter ! Complètement jeter parfois ! (pensons un peu au problème de Gallaudet en ce moment tiens…)
Surtout si on ne connaît pas la langue des signes.
Le seul chemin qui nous permette vraiment d'entrer, de persévérer dans cette voie, ce sont les sourds qui se taisent parce qu'ils ont eux aussi été oralistes, ou bien parce qu'ils se disent "mon dieu on ne peut pas le laisser tout seul à souffrir, s'il vient auprès de nous c'est qu'il en a besoin", mais parfois à défaut de connaître la langue des signes ou la culture sourde, on n'est autorisé à avoir son mot à dire qu'avec une certaine retenue ‘parce qu'on n'y connait rien’.
C'est vrai, parfois, maintenant que je comprends de mieux en mieux la culture sourde, parce que mon copain est sourd, parce que ses amis le sont, parce que les miens le sont, ... et parce que je suis sourde aussi moi dans le fond !
Et cet oralisme-là, c’est pas ma faute !

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Intervention de Bernard le Maire, sourd profond, époux d'une sourde, père de deux filles sourdes, petit-fils des sourds, arrière-petit-fils des sourds, petit-neveu des sourds... :

Après avoir lu vos messages bien fort intéressants sur l'implant cochléaire, je me permets de vous dire que la bonne communication précoce (surtout en langue des signes et en oral) entre les parents et leur enfant sourd est la clé de la réussite pour l'enfant sourd. L'acceptation de la surdité de l'enfant (par les parents et aussi par l'enfant lui-même = identité), les informations journalières, la lecture au lit sont des avantages précieuses ...
Grâce à cela, l'enfant pourrait bien réussir sa vie émotionnelle, intellectuelle et sociale avec ou sans implant cochléaire (je ne sais pas encore si l'implant cochléaire serait un bon avantage dans ce cas) ...
Je dois signaler que sans ces avantages, l'enfant sourd implanté réussirait difficilement sa vie ...

Bonne chance avec vos enfants sourds qui iront loin si vous les entourez bien sans trop les couver !

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Je ne suis pas contre les implants cochléaires MAIS dû à leur ignorance de la culture et de la vie des sourds, les médecins décident trop vite d'implanter n'importe quel enfant sourd donc, à mon PROPRE AVIS, à peu près 80 % des sourds implantés ne progressent pas plus loin que les sourds non-implantés tandis que les 20 % à peu près (surtout des enfants sourds qui acceptent leur surdité et dont les parents savent qu'ils resteraient TOUJOURS sourds malgré leur implant cochléaire, respectent surtout la langue des signes et la culture des sourds, prennent le plaisir de communiquer énormément (avec beaucoup d'affection) avec leur enfant sourd implanté: oralement et aussi en langue des signes alors ces 20 % pourraient aller très loin en intégration avec les enfants entendants et communiquer mieux avec les entendants mais restent en contact avec les sourds bien sûr !!
De plus, beaucoup parmi ces 80 % enfants "ratés" font partie du milieu familial défavorisé ......

Donc ces 80 % représentent énormément de l'argent jeté par la fenêtre (car les implants cochléaires sont 100 % gratuits à mon étonnement ...) : cela pourrait compter des millions d'euros qui devraient très facilement apporter des sous-titres à TOUTES les émissions de télévision en Belgique, former beaucoup de professionnels sourds (= excellents modèles pour enfants sourds) dans la section éducation (instituteurs, régents, éducateurs, spécialistes en communication, psychologues, assistants sociaux etc ...), et aussi des dizaines de nouveaux interprètes en LS qui pourraient assister aux enfants sourds intégrés aux écoles primaires, secondaires et supérieures et aussi aux universités et encore beaucoup d'autres avantages (par exemple, plusieurs clubs pour les sourds en Belgique ont des difficultés financières ...).
J'ai rencontré des étudiants sourds qui ont abandonné leurs études par MANQUE d'interprètes en LS ..........

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